vendredi 7 novembre 2014

Maldives, Nature contre Avion

Un dossier dans le cadre de mon travail m'amène souvent à visiter les îles Maldives. Cette destination de rêve a su garder tout son charme grâce à ses préoccupations écologiques, et a ainsi échappé aux pièges et à la dégradation auxquels sont confrontés tous les sites de tourisme. Vous comprendrez donc mon étonnement quand j'ai découvert, au court de ma dernière visite, qu'une société étrangère envisageait très sérieusement de proposer des vols en avion de chasse au-dessus de ce paradis. Les Maldives sont composées de 26 atolls dispersés dans l'océan Indien, du nord au sud, en forme de point d'exclamation : ils forment un pays des merveilles fragile, fait de sable blanc, de palmiers, de lagons, de récifs, et de mers d'un bleu à la Hockney. Sur leur territoire de 90 000 kilomètres carrés, moins de l% sont terrestres, et si le niveau des mers montait de quelques centimètres, ses 1 200 îlots plats disparaîtraient. Chaque lieu de villégiature occupe une île privée et s'efforce de valoriser ses propres merveilles marines. Les amateurs de plongée sous-marine peuvent se délecter devant des kilomètres de jardins coralliens, faciles d'accès, baignés d'eaux cristallines et peu profondes. Ils peuvent y croiser de petites créatures colorées comme le poisson chirurgien, le gaterin arlequin et le poisson de verre, mais aussi d'imposants requins corail ou des raies mantas. Sur l'eau, les visiteurs n'ont que l'embarras du choix, de la pêche en haute mer aux tours de kayak, ou peuvent se livrer à la lecture, la sieste, ou simplement songer à la chance qu'ils ont d'être là dans un hamac, face au paysage. Mais je doute que ce visiteur apprécierait d'être tiré de son enchantement par le bruit de moteurs d'un avion de chasse volant à basse altitude. Les natifs des Maldives n'habitent même pas un cinquième des îles, et il est rare de croiser un autochtone, hormis les employés de l'hôtel. Le tourisme est donc vital pour l'avenir des Maldives, et la plupart des hôtels sont sensibilisés aux aspects sociaux et environnementaux. Le Banyan Tree Vabbinfaru – dont les 48 villas sont à quelques pas de la mer – peut s'enorgueillir de sa gestion de l'océan : il a établi un laboratoire marin qui, entre autres efforts, assure la protection des tortues de mer qui nidifient sur ses plages. Le Gili Lankan fushi, primé, propose 45 bungalows placés sur l'eau (certains ne sont accessibles que par bateau), construits en matériaux naturels et ouverts aux brises marines. Ici, on vit en toute sérénité, en suivant la règle « Pas de nouvelles, pas de chaussures ». Ici aussi, le développement durable est une priorité, à travers des règles ambitieuses de préservation et des programmes pédagogiques avec les communautés locales. Les deux établissements sont de véritables paradis insulaires : il suffit de passer un moment dans les restaurants en plein air au bord de l'eau pour le comprendre. Les investisseurs étrangers à l'origine de ce projet d'aviation n'ont absolument rien compris à la philosophie de ces îles. La plupart des entreprises qui proposent ce type de prestation veillent à les proposer dans des régions précises, où leur passage ne dérange pas. Un avion de chasse dans ces îles serait à mon sens une hérésie, et nuirait non seulement à l'écologie, mais également à l'économie. Source: Avion de chasse